L'utopie de la Cité
Publié le 07 septembre 2020, 00h00« Le temps passé à écouter l’autre est plus important que le colis distribué » disait Jean Rodhain. C’est à la lumière de cette phrase que je souhaite me remémorer les moments les plus forts vécus au cours de mon séjour à la Cité St-Pierre où pour la troisième année consécutive j’ai eu la chance d’être bénévole cet été durant quatre semaines. C’est que la Cité est un espace privilégié de la rencontre, celle des pèlerins, des groupes, des bénévoles, de l’équipe de permanents. Je n’ai quasiment jamais retrouvé cela ailleurs. La Cité est comme une utopie, qui se construit dans une réalité où chacun arrive avec son parcours de vie, ses fragilités et sa richesse et peut offrir quelque chose de soi à l’autre. Alors, pour vivre pleinement ce temps, il faut écouter, beaucoup écouter, et partager. Bien sûr, cette année, la crise sanitaire a donné un aspect inhabituel qui a fortement impacté Lourdes, le sanctuaire, et conduit la Cité à limiter le nombre de pèlerins et restreindre les grands rassemblements et moments festifs qui, en temps normal, ponctuent la période estivale et font vibrer les émotions et les cœurs. Avec l’obligation parfois contraignante d’appliquer des règles de vie collective marquées par la distanciation. Mais peut-être que celle-ci a, paradoxalement, permis d’ouvrir sur une plus grande proximité des relations, une dimension plus intimiste, en quelque sorte, propice à mieux se connaître, dans une ambiance plus calme, et d’être davantage sensible au magnifique cadre naturel favorisant paix et ressourcement. D’ailleurs cela n’a pas empêché de profiter de nombreuses occasions de vivre de beaux moments de célébrations, de processions, ou de chants et de musiques d’ailleurs et d’ici, notamment avec le Réseau St-Laurent.
J’ai pour ma part retrouvé un certain nombre de visages connus parmi les bénévoles, parfois comme on retrouve des amis avec qui on ne fait qu’un bout de chemin mais qu’on a l’impression de ne jamais avoir quittés, et découvert de nouveaux venus. Beaucoup m’ont dit leur bonheur d’être là, et plusieurs anciens considèrent la Cité comme une seconde famille. J’ai pu aussi rencontrer des pèlerins, souvent en situation de précarité ou d’exclusion et qui à de multiples reprises ont exprimé leur reconnaissance et leur joie d’être ainsi accueillis en ce lieu. C’est que nous sommes là au cœur de la démarche du Secours catholique et de sa « révolution fraternelle ». Et au cœur de celle de Bernadette, si humble et si pauvre qui a su écouter le message de Marie et recevoir la grâce d’un immense amour, celui du Royaume que Dieu a promis à tous les hommes. De quoi nous remettre sur les routes de l’espérance.